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En a-t-on pour son argent avec les Free to play?

par Akashar

Le modèle Free to play a eu beaucoup de succès passé un temps, et encore aujourd’hui, beaucoup de nouveaux jeux suivent ce format. Il semble cela dit que l’effet de mode soit retombé, et que le terme “free to play” ne soit plus sur toutes les lèvres aujourd’hui. Pourquoi y a t-il eu une mode du free to play, et pourquoi est-elle passée? Ce modèle est il pour autant bon à jeter?

On va essayer de tirer tout cela au clair.

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Vous pouvez lire le début de cet article gratuitement, mais devrez payer 50 euros pour lire la fin.

Pourquoi y a t-il eu une mode du free to play?

A mon sens, le free to play est apparu comme un modèle d’abord concurrent, puis complémentaire, du jeu par abonnement. Le modèle est exclusif ou presque aux jeux en ligne, comme le modèle par abonnement, et il est apparu après ce dernier. A l’origine, les éditeurs de jeux vidéo créaient un jeu comme World of Warcraft par exemple, puis demandaient à leurs joueurs un paiement mensuel pour assurer la sortie de nouveaux contenus, la maintenance des serveurs et l’administration de la communauté, le contrôle des hackers, etc. Ce mode convient très bien encore aujourd’hui à des géants comme Blizzard qui ont les moyens de leurs ambitions, et peuvent dépenser des dizaines de millions de dollar en marketing, s’assurant par là même que tout le monde connait leur jeu et va vouloir y jouer. Et pour cela, il faudra payer! C’est donc en grande partie le marketing du jeu qui sera financé par les achats, puis les abonnements.

En revanche, chez les free to play, le souci est souvent le manque d’argent pour commencer, ce qui empêche de lancer des campagnes d’annonces grandioses à coup d’acteurs d’hollywood et de grands effets spéciaux (Vous n’avez qu’à regarder les bandes annonces des derniers call of duty pour vous faire une idée de quoi je parle). Le parti qui est pris est donc dans ces cas là de ne pas imposer de barrière de prix aux joueurs, pour maximiser la taille de la base dès le jour de la sortie, tout en leur proposant une expérience de départ alléchante afin de les fidéliser. Le modèle Free to play s’est donc popularisé sur ces bases là, et, il faut le dire, au même rythme que les fameuses “dollar app” sur mobile, qui font concurrence aux jeux triple A aux budgets démesurés. La liste des jeux free to play ne fait que s’allonger, mais que dire des jeux mobiles, comme tous les clones de candy crush, et autres? (Je ne citerais que ceux-ci de par leur notoriété déjà existante, et ne ferais pas de publicité pour les autres) Celle ci explose constamment, selon un modèle maintenant bien connu, que s’efforcent d’imiter les éditeurs de “vrais” jeux vidéo:

-Monnaie virtuelle abondante obtenable par le jeu, permettant les upgrades, qui sont nombreux.

-Autre monnaie virtuelle que l’on ne peut que gagner à un rythme très lent, uniquement par sa présence répétée sur le jeu, ou bien acheter avec du vrai argent. Les montants de cette monnaie sont souvent de l’ordre de 1 pour 100 ou pour 1000 (mais ça peut varier) ce qui donne une fausse impression de richesse. “Super, j’ai 25 000 lingots d’or!” En général vous en gagnez toujours un peu, ce qui vous motive à sortir le porte monnaie pour compléter les montants. Il est quasiment impossible de retomber à zéro une fois que l’on a commencé, c’est fait pour. Cette monnaie sert à rallonger le temps de jeu (gagner des vies, de l’énergie…) et à acheter l’autre monnaie également. Tout est fait pour perdre ses repères avec l’argent réel.

-Limitation artificielle du temps de jeu pour obliger les joueurs à rester connectés, et à dépenser leur argent virtuel acheté avec de l’argent réel pour pouvoir faire des sessions plus longues. Ce n’est bien sur pas obligé, mais l’option est là, donc…

-Boutique d’upgrades et d’objets de customization très abondants, à tous prix.

-Jeu infini, dans le sens ou il se joue au score, et où il n’y a pas de fin, de nouveaux niveaux sont ajoutés sans cesse. Il est donc impossible de le finir, et d’en avoir fini avec le jeu.

-Bonus de présence quotidienne continue. (Si vous ne venez pas un jour, vous devez recommencer de zéro une série de bonus qui augmente chaque jour si vous êtes toujours là)

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Vous insérez les sous pour jouer et c’est l’éditeur qui gagne le jackpot.

Vous reconnaissez certains jeux mobiles auxquels vous jouez aujourd’hui? C’est normal! Et vous pourrez me dire que vous n’y avez jamais dépensé un centime, et vous aurez raison. Mais sachez que l’investissement pour les éditeurs de ces jeux vidéo reste minime, alors que certaines personnes vont jusqu’à dépenser toutes leurs économies dans ces jeux. Qui achète le “coffre fort de jetons” à 50 euros? Des gens le font. Et ils le font même plus qu’on ne le pense. Les américains appellent ces joueurs des baleines, des personnes capable de dépenser leur salaire entier dans des upgrades, des points, des gemmes, des lingots, des jetons, et j’en passe. Il y a déjà une littérature considérable à ce sujet, et ce n’est pas le but de cet article d’expliquer comment cela peut-il se produire, mais simplement de montrer que ce phénomène existe et comment les éditeurs l’exploitent.

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Le joueur moyen d’après l’industrie du jeu vidéo

C’est à ce moment là que les choses se gâtent, au moment où les éditeurs de jeux de PC décident d’imiter en profondeur les éditeurs de jeux pour plateforme mobile. Qui ne le ferait pas? C’est effectivement un marché en plein développement représentant des millions d’euros! La première étape est d’intégrer une boutique dans le jeu, la suivante de rendre le jeu gratuit, et de reproduire le schéma ci dessus plus ou moins fidèlement. C’est là que la mode du free to play a subi un sérieux contrecoup.

Pourquoi la mode est-elle passée?

Il y a une grosse différence entre la façon dont les joueurs perçoivent les jeux d’ordinateurs, fussent ils gratuits, et les jeux sur support mobile. C’est ce qui a contribué à l’échec de jeux comme Allods online, car le modèle proposé n’était pas du tout adapté à la culture du public visé. Dans le cas de ce jeu, l’éditeur a voulu forcer les joueurs à dépenser de l’argent dans le jeu, par le système qu’on appelle Pay to win, ou P2W, littéralement payer pour gagner. Un joueur payant débutant sera toujours bien plus fort qu’un joueur n’ayant jamais payé, même si il joue depuis bien plus longtemps. C’est cette façon de prendre les gens pour des vaches à lait qui a conduit à l’échec des serveurs gratuits, et qui a forcé l’éditeur à lancer des serveurs payants où tout le monde a les mêmes chances. Et allods online n’est qu’un exemple parmi d’autres, de jeux à l’échec parfois évident ou simplement relatif, qui ont tenté de se transformer tout simplement en machine à sous. Et du même coup, cette tactique commerciale déplorable a contribué à détruire le prestige du free to play, alors que le modèle aurait pu être viable, si, comme certains jeux qui ont réussi depuis, quoique de façon beaucoup plus subtile du coup, il avait été tourné vers les joueurs plutôt que leur porte monnaie.

Prenons l’exemple de 2 jeux qui ont réussi le pari, de deux façons différentes. Planetside 2 est un MMOFPS, ce qui signifie que tous les joueurs sont en permanence ensemble sur une carte immense pour s’affronter, expérimentés comme débutants, et payants comme gratuits. Comment dans ce cas arriver à équilibrer le jeu, et ne pas le transformer en Pay to win?

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Un jeu qui vous fera l’effet d’une révélation divine!

Tout simplement, par ce que l’on appelle des sidegrades. Tous les objets que l’on va débloquer, ou acheter avec du vrai argent, sont des objets à destination différente, mais à puissance équivalente. Telle arme sera une arme de corps à corps, celle ci sera meilleure à mi distance, telle autre sera plus forte à longue distance, une autre encore aura des statistiques inférieures mais un jeu d’accessoires plus complet, etc. Ce qui fait qu’en théorie, les joueurs débutants auront peu de retard à rattraper sur les joueurs les plus forts. Par exemple, un joueur débutant qui a déjà joué à d’autres FPS aura toutes les chances de rentrer un magnifique tir à la tête sur un joueur vétéran, et ses balles feront les mêmes dégâts que le joueur chevronné. De plus, en se spécialisant, un joueur aura tôt fait de débloquer pour son personnage les atouts qui feront de lui un maître de certaines situations, et le reste du jeu sera simplement affaire de gagner plus de certifications, permettant de s’améliorer ailleurs également et de devenir polyvalent. Ce qui n’empêche pas les joueurs les plus expérimentés de massacrer régulièrement les nouveaux, mais cela se fait en un mot par l’expérience du terrain, et des armes. Un nouveau joueur à qui l’on débloque tout fera à peine mieux qu’un nouveau joueur à qui on ne débloque rien, et c’est une différence énorme. On sait qu’en s’améliorant, on peut devenir le meilleur.

C’est pour maintenir cet équilibre et pour éviter qu’on se lance dans une course à l’armement (World of warcraft est un bon exemple de ce genre) que les développeurs surveillent les statistiques de chaque arme et véhicule, pour s’assurer qu’elles ne deviennent pas trop utilisée, ou au contraire oubliées. Et les nouvelles armes ne sont pas mieux que d’autres, mais ont des rôles qui ne sont pas remplis aujourd’hui par les armes existantes. Ce qui conduit souvent les joueurs vétérans à dire qu’une nouvelle arme est OP (Over Powered) dans les premiers jours suivant sa sortie, car ils ne sont pas habitués à être concurrencés sur le terrain occupé par cette arme.

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Puisqu’on vous dit qu’elle a seulement l’AIR de faire plus mal! Faites pas vos chochottes, revenez!

Dans un autre style, War Thunder fonctionne très différemment. C’est un jeu d’arcade/simulateur de combats aériens de la seconde guerre mondiale, ainsi que de chars. (Et peut être, un jour, de navires, on peut rêver!) Le jeu se joue en matchs, et les équipes sont composées aléatoirement, d’un nombre de joueur relativement faible comparé à Planetside 2. Les joueurs ne sont donc pas placés tous ensemble sur la même carte, et tout repose sur le matchmaking, qui empêchera les joueurs disposant d’engins perfectionnés de les utiliser sur des ennemis débutants.

Pour débloquer le char tout en bas, vous devrez soit jouer longtemps, soit dépenser beaucoup d’argent. Personne ne vous force, et vous n’aurez pas de victoire plus facile en payant.

Acheter d’un coup tous les chars les plus puissants ne permettra donc que de jouer instantanément au niveau du jeu le plus violent, là ou tous les as se retrouvent depuis des années pour perfectionner leurs réflexes et leurs compétences. Autrement dit, vous aurez une sévère déception si vous imaginez solutionner les problèmes à coup de billet verts. (les bleus ou oranges ne donneront rien non plus). Vous aurez également la possibilité d’avoir un avantage à court terme en payant les upgrades de vos machines plutôt que de jouer pour les rechercher, mais ça ne garantit pas qu’en face les autres joueurs n’ont pas fait de même, et de toutes façons ça ne change pas non plus tout le déroulement du jeu, et n’influe pas sur le matchmaking.

Les joueurs pourront donc payer pour débloquer les chars plus vite, pour les améliorer plus vite, mais ça ne les fera pas gagner pour autant. Et de fait, ayant toutes les cartes en main (arbre de technologie visible à tout moment, matchmaking sommairement expliqué), les joueurs ont confiance et savent qu’ils n’ont pas besoin de payer pour gagner. Pourquoi certains payent ils dans ces cas là?

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Payez pour la classe de voler à bord du mythique Grand Charles. Une apparence que vous pouvez débloquer en jouant, ou en l’achetant.

Comment ces jeux réussissent ils à attirer des joueurs payants, alors qu’on ne gagne quasiment aucun avantage à payer? Comment faire pour que les joueurs aient envie de dépenser de l’argent dans le jeu sans qu’on les y force? Beaucoup d’éditeurs devraient connaître la réponse à cette question, et peu s’en soucient hélas.

Quel est l’avenir du free to play?

La réponse est simple, transformer le modèle du F2P P2W, ou “jouer gratuitement mais payez pour gagner”, en modèle F2P PFC ou “jouez gratuitement, et payez pour la rapidité”. Merci à Wrel qui a imaginé cet acronyme qui est à mon sens, LA solution. Vous êtes éditeur, et vous avez fait un bon jeu gratuit, beaucoup de monde est dessus, et compte y rester. Comment faire pour qu’ils dépensent leur argent? Leur offrir des victoires faciles en échange d’argent?

Non! Vous leur permettez simplement, à l’instar de planetside 2 et War thunder, de débloquer en payant ce qu’ils auraient pu de toutes façons débloquer en jouant, mais “ho là là il est trop beau cet avion/fusil je le veux je le veux je le veux tout de suite”. Et c’est fait! Personne ne se plaint d’un système comme celui-ci.

De plus, vous prendrez également soin d’avoir une boutique de cosmétiques payantes, non déblocables en jouant, ou seulement en partie, pour inviter les joueurs à investir dans leur look. Ce qu’ils feront d’autant plus facilement qu’ils n’auront pas l’impression que le reste du jeu n’est qu’une tentative peu subtile de leur voler leur portefeuille.

Il est donc tout à fait possible aujourd’hui de sortir des jeux free to play qui fonctionnent très bien, en témoignent les flopées de MOBA ( LoL, DotA, et j’en passe beaucoup, beaucoup, beaucoup!) qui se déclinent tous sur le même principe: Le jeu est gratuit, mais tout outil de personnalisation est payant. Si vous aimez le jeu, vous payez; si vous n’aimez pas, ou ne voulez pas vous y investir, vous ne payez pas. Cela place la barre des développeurs et de l’éditeur très haut, car il ne peut plus se permettre de décevoir ses joueurs avec un contenu trop faible, ou trop fort, ou sans intérêt, car son revenu dépends directement du nombre de joueurs sur le jeu. Si l’éditeur autorise la sortie d’un item ou personnage extrêmement fort, il aura un bond tout d’abord dans ses revenus car les joueurs vont tous l’acheter, mais il vont vite se plaindre de l’équilibre du jeu, et commenceront à partir et critiquer, et deviendront plus frileux du portefeuille. Il faut donc réguler par des nerfs/buffs les nouveaux items pour les garder dans l’équilibre du jeu, et ainsi garder la confiance des joueurs.

A mon sens, le free to play maitrisé ainsi représente l’avenir, pour cette raison simple: L’éditeur ne peut pas abandonner le jeu ou simplement compter sur un effet d’annonce, il est obligé de tenir ses promesses tout au long du cycle de vie du jeu pour s’assurer un retour sur investissement. C’est sur, le free to play est difficilement applicable aux jeux à vocation solo essentiellement, mais pour les jeux multijoueurs, il est ce qu’il y a de plus logique.

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Et ainsi, les joueurs et les éditeurs s’uniront, pour ériger l’avenir en un glorieux édifice!

Alors, si vous jouez à des free to play, posez vous la question de savoir si ce jeu mérite que vous y investissiez de l’argent en plus de votre temps, et si votre réponse est oui, allez-y! Il n’y a pas de mal à supporter un jeu que vous aimez! Certains disent que du moment où un jeu est gratuit, ils ne débourseront jamais rien pour celui-ci. Je pense que c’est dommage, car si tout le monde faisait cela, personne ne pourrait jouer gratuitement et ce modèle ne fonctionnerait pas. Les éditeurs n’ont pas besoin, quoi qu’ils en disent, de vider votre portefeuille pour sortir de bons jeux. Faites tout de même attention de ne pas dépenser toutes vos économies, vous pourriez en avoir besoin ailleurs!

 

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